Manufacture de Saint-Cloud, Paire de vases cornets et paire de vases bouteille, vers 1700

Manufacture de Saint-Cloud, Paire de vases cornets et paire de vases bouteille, vers 1700

Porcelaine tendre, décor bleu sous couverte
Vases cornets : H. 20,8 ; D. 9,8 cm, acquis grâce au legs consenti par Alfred Louis Emmanuel Beurdeley, 1921, Inv. 22281 A-B
Vases bouteilles : H. 21 ; D. 7,6 cm, achat, 1930, Inv. 27643 A-B
© Les Arts Décoratifs

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À Rouen, dès 1672, Louis Poterat avait obtenu un privilège pour fabriquer de la porcelaine mais sa production, quoique de très grande qualité, fut limitée et s’interrompit avant la fin du XVIIe siècle. C’est à la manufacture de faïence de Saint-Cloud, fondée en 1666, que l’industrie de la porcelaine prit véritablement son essor : les premiers essais du faïencier Pierre Chicaneau, menés dans les années 1670, aboutirent dans les années 1690 à une production en nombre. Il est vrai qu’il ne s’agissait pas, dans les deux cas, de porcelaine véritable, c’est-à-dire de porcelaine dure à base de kaolin – à l’image de la porcelaine de Chine –, mais d’une porcelaine tendre, où cette argile pure, réfractaire, de couleur blanche, alors inconnue en Europe, était remplacée par une fritte, mélange calciné, vitreux, broyé et ajouté à la pâte. Confrontés à cette incapacité à obtenir du kaolin, les porcelainiers français avaient réussi à créer un matériau nouveau et séduisant, translucide, de couleur légèrement ivoire. Ces deux paires de vases témoignent de la grande qualité des produits de la manufacture de Saint-Cloud autour de 1700 ; l’entreprise, privée, était alors placée sous la protection officieuse du duc d’Orléans qui résidait dans le proche château de Saint-Cloud, et la Cour constituait l’essentiel de la clientèle. Formes et décors s’inspirent directement des modèles chinois, copiés avec une précision et une finesse tout à fait remarquables. Les languettes qui rayonnent au col et à la base sont peintes en réserve de rinceaux qui abritent en partie basse des animaux chimériques proches du ki-lin chinois. Le motif central rayonnant posé sur la pointe est une particularité de la manufacture, que l’on retrouve également sur les faïences qu’elle a continué de produire, parallèlement à la porcelaine. Le savant britannique Martin Lister, qui visita la manufacture en 1698, a apporté le plus ancien témoignage sur cette production dont il admirait la grande qualité, confessant « qu’il ne pouvait distinguer entre les vases faits là et les plus fines pièces de Chine qu’il ait jamais vues », suggérant même que les décors y étaient mieux peints. Ces vases devaient figurer en bonne place au sein des cabinets de porcelaine, souvent associés à de véritables porcelaines de Chine, selon des compositions décoratives mises à la mode par des ornemanistes tels que Daniel Marot (v. 1661-1752). Le premier inventaire de la manufacture, dressé en 1700 à la mort de son directeur Henry Trou, révèle la variété des formes de vases produits : urnes (couvertes), cornets, calebasses et rouleaux « servant aux garnitures de cheminées ».

B. R. Christiane Lahaussois, Porcelaines de Saint-Cloud. La collection du Musée des Arts Décoratifs, Paris, Union centrale des arts décoratifs-Réunion des musées nationaux, 1997, p. 29, repr. p. 17.
Bertrand Rondot (sous la dir. de), Discovering the Secrets of Soft-Paste Porcelain at the Saint-Cloud Manufactory, ca. 1690-1766, New Haven & Londres, Yale University Press, 1999, repr. p. 51 et p. 118.

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