En art décoratif, cette « tromperie des yeux » recouvre différentes réalités : l’imitation, le pastiche ou les illusions d’optique. Elle s’applique autant à l’objet (céramique, orfèvrerie, papier-peint, bijou…) qu’à la mode ou à l’affiche. Cette tromperie concerne autant la matière, la technique, le sujet que l’usage. On observe par exemple, que de nombreuses matières vont être imitées par d’autres : la céramique imite le jaspe, les roches rares, le porphyre ou l’or ; le linoléum, le plancher ; le strass, le diamant ; la broderie, le bijou… La virtuosité devient très vite le principal ressort de ces recherches. Plus seulement ersatz bon marché de matières luxueuses, ces techniques deviennent des savoir-faire propres à développer la maîtrise des artisans. Le papier-peint sera le support idéal de cette forme d’expression. Capable de toutes les illusions, il reproduit tous les matériaux, du plus modeste au plus somptueux : bois, laque, faïence, paille, velours ciselé. Il peut même se substituer à une huile sur toile et à son encadrement de bois doré.
L’objet nous trompe sur sa matière comme il peut nous tromper sur sa fonction. Un objet peut en cacher un autre : dissimuler ce qui doit rester discret ou jouer sur la notion de surprise. Que trouve-t-on derrière la façade d’un secrétaire ou qu’est-ce qu’un « cabinet d’affaire » ?
En jouant avec les styles et les références, l’objet nous trompe aussi sur son époque. Le Moyen-Âge réinterprète l’Antique alors que le XIXe siècle imite le Moyen-Âge, la Renaissance ou les civilisations orientales… De grands créateurs s’illustrent d’ailleurs dans ces domaines : Théodore Deck revisite les arts de l‘Islam, Gabriel Viardot ceux de la Chine ou du Japon, tandis que Charles-Jean Avisseau travaille à la manière de Bernard Pallissy. Ce système de références est un des ressorts utilisé au XXe siècle par les publicitaires qui font notamment allusion aux chefs-d’œuvre de la peinture pour imaginer leurs campagnes.
Au-delà du trompe-l’œil, les jeux fondés sur les mécanismes de la vision, effets d’optique et illusions visuelles sont tout autant utilisés par les créateurs pour troubler la perception du réel.
La mode, plus que tout autre domaine, assume et revendique le théâtre des illusions les plus folles. Du XVIIIe au XIXe siècle, perruques, tournures, faux-cul sont autant là pour tromper que pour sublimer le corps et le vêtement.
Comme un jeu de piste à travers les siècles et les matières, c’est au grand jeu de l’illusion que nous convie cet accrochage. Réunis en douze thèmes près de 400 objets, jamais ou rarement montrés se font écho et témoignent des inventions techniques et artistiques. De « Ombre et lumière » à « Une matière peut en cacher une autre » en passant par « Optique hypnotique » ou l’évocation d’une vraie fausse Period Room, le visiteur aura les clefs pour découvrir les artifices du trompe-l’œil et de l’imitation.
Les 2D sont pipés / Ombres et lumière
Comment donner l’illusion de l’espace et simuler la profondeur. Du sol au plafond, les perspectives et simulations de toutes sortes créent d’étonnantes percées. La grisaille comme le polissage du métal font ressortir le relief et jouent avec subtilité sur la profondeur…
Optique hypnotique
Les effets d’optique ont, de tout temps, suscité l’intérêt des créateurs. Parmi ceux-là, les anamorphoses font partie des plus spectaculaires et leur capacité à émerveiller reste intacte. Comparées à « une image engloutie dans un torrent », elles détruisent à première vue la figure pour la reconstruire sur un support cylindrique. D’autres artifices vont chercher à créer l’illusion : mouvement, savants pliages, collage, jeux linéaires…
Faux culs / Cousu de fil blanc
Tournures, corset, perruque… l’artifice fait partie intégrante de la mode. Il corrige ou sublime le corps. Motifs, matières et techniques jouent avec le faux, l’artificiel. Des fausses poches, aux bijoux brodés en passant par les effets froissés, il simule à si méprendre la patine du temps voire se confond avec la peau.
Faire comme si... / Une matuère peut en cacher une autre
Ces salles présentent des catalogues de Linoleum, papier peint, Formica, déclinant faux bois, faux planchers, faux carrelages, faux tapis et mettent en scène des objets dont la matière n’est pas celle que l’on croit.
A la manière de…
Dans la deuxième moitié du XIXe siècle, l’imagination de nombreux créateurs est stimulée par d’autres cultures ou d’autres artistes. L’Orient exerce un puissant attrait chez nombre de créateurs. Les motifs, mais aussi les techniques anciennes, sont l’objet d’expérimentations passionnées.
Ça trompe énormément
Comme dans un jeu de cache-cache la double fonction est reine et la fonction principale de l’objet n’apparaît pas à première vue : boîte en forme de livre ou en forme de chou, lorgnette dissimulée dans un éventail ou pudique tabouret d’affaire.