Trente quatre dessinateurs internationaux proches de la maison d’édition l’Association ont été invités à réaliser des planches ou à reconstituer leurs univers à partir d’une sélection de jouets emblématiques de la collection. Toy Comix met plus particulièrement en valeur l’importance des jouets et des jeux dans l’univers de certains auteurs de bande dessinées, qu’ils aient eux-mêmes déjà réalisé des jouets ou figurines, ou qu’ils aient eu une approche expérimentale du jeu au sein de leur pratique d’auteur. Cette exposition est organisée avec Jean-Christophe Menu, éditeur, co-fondateur de l’Association et de l’OuBaPo (Ouvroir de Bande Dessinée Potentielle). Toutes les bandes dessinées exposées sont des créations originales qui ont fait l’objet d’une commande et seront mêlées aux jouets de la collection.
18 jouets, 18 histoires
Le Musée des Arts Décoratifs a commandé à dix-huit auteurs trois planches de bandes dessinées. Chacun d’entre eux a choisi un jouet qui devient le personnage principal de sa bande dessinée.
Univers personnel, souvenir d’enfance… Pour chaque auteur, les raisons qui ont dicté le choix du jouet sont variées. Un seul trait commun : la représentation humaine ou animale. Blexbolex s’est ainsi entiché d’une poupée qui lui rappelle à la fois Betty Boop et le petit Chaperon rouge. Ruppert & Mulot ont préféré un étrange jouet du milieu du XIXe siècle et un méhari portant un soldat blessé. Blutch a opté pour des figurines d’indiens et de cow-boys chères à son enfance et à son univers dessiné.
Chaque jouet devient le personnage principal des bandes dessinées. La commande s’effectue sur trois planches de 24 x 32 cm en noir et blanc. Avec ou sans bulles, il n’y a pas de contrainte autre que l’utilisation narrative du jouet choisi au sein de l’univers graphique et narratif habituel du dessinateur. Les planches seront exposées dans des vitrines aux côtés des jouets.
Liste des auteurs :
Max Andersson (né en 1964 en Suède), Blexbolex (né en 1966 en France), Blutch (né en 1967 en France), Fanny Dalle-Rive (née en 1976 en France), Anke Feuchtenberger (née en 1963 en Allemagne), Renée French (née en 1963 aux États-Unis), Tom Gauld (né en 1976 en Écosse), Dominique Goblet (née en 1967 en Belgique), Matti Hagelberg (né en 1964 en Finlande), Mattt Konture (né en 1965 en France), Mahler (né en 1969 en Autriche), Massimo Mattioli (né en 1943 en Italie), Catherine Meurisse (née en 1980 en France), Ruppert & Mulot (Florent Ruppert, né en 1979 et Jerôme Mulot en 1981 en France), Anna Sommer (née en 1968 en Suisse), Caroline Sury (née en 1964 en France), Jim Woodring (né en 1952 aux États-Unis), Aleksandar Zograf (né en 1963 en Serbie).
L’OuBaPo
La phase OuBaPo intervient après celle des 18 dessinateurs. François Ayroles, Baladi, Jochen Gerner, Etienne Lécroart, Anne Baraou et José Parrondo, JC Menu réalisent une bande dessinée collective sous contrainte.
Chacun des 6 auteurs réalisera 9 strips (3 de 3 des 18 personnages) en mettant en scène dans un nouveau contexte les 18 jouets choisis à l’étape précédente. En outre, chaque auteur aura l’obligation d’introduire dans les strips réalisés au moins un des personnages précédents, en guise de personnage secondaire. L’ensemble formera 54 « daily-strips » donnant une nouvelle vie aux 18 jouets choisis et développant une autre forme classique de bande dessinée.
L’OuBaPo, l’Ouvroir de Bande Dessinée Potentielle, a été fondé en 1992 au sein de la maison d’édition l’Association. Il reprend les principes de L’OuLiPo, le célèbre « Ouvroir de Littérature Potentielle » créé en 1960 par le poète Raymond Queneau et le mathématicien François Le Lionnais. A la manière de l’OuLiPo avec la littérature, l’OuBaPo crée des bandes dessinées en se fixant des contraintes d’ordre mathématique ou structurelle.
Les « Univers »
Des dessinateurs ayant déjà travaillé sur le thème du jouet réalisent dans de grandes vitrines des installations. Mêlant des jouets de la collection et leurs propres œuvres, ils traduisent leurs univers personnels.
Benoît Jacques (né en 1958 en Belgique)
Poudre d’Anges, 2007
L’idée de voler a toujours été très présente chez moi. Depuis tout petit, je rêve régulièrement que je vole ou que je chute très lentement, tel un parachutiste… Le vol, pour moi, est aussi associé à la chute mais c’est une chute avec parachute, une chute qui ne fait pas trop mal ! Les parachutistes sont un peu comme des anges qui tombent…
Les jouets volants de la collection du musée ainsi que les anges, les parachutistes et vaisseaux « présentoirs volants » que j’ai fabriqués traduisent donc cette idée. Je tenais à ce que les objets soient tous accrochés, à ce qu’aucun ne touche le sol. Ils ont ainsi leur propre dynamique, une forme de liberté qui les fait presque sortir de cette vitrine froide et métallique.
Le blanc ocre chamarré permet de bien distinguer mes objets des jouets de la collection. Il renforce aussi cette idée de chaleur, de lumière et de légèreté. »
Blanquet (né en 1973 en France)
Perte de connaissance sous les visages
« Dans la collection du musée, j’ai cherché des jouets qui se rapprochaient de mon univers. Or, depuis toujours, j’aime les poupées. Les poupées « cheap », usées et bizarres. Un peu à la manière de Hans Bellmer, le surréaliste, qui avait fait de sa poupée son œuvre principale. Je suis aussi fasciné par leurs articulations, c’est pour cela que je voulais qu’elles soient nues. »
« Le changement d’identité, la dissimulation sont aussi des thèmes récurrents dans mon univers. J’ai toujours pensé qu’on pouvait se raconter beaucoup plus d’histoires quand on est masqué… D’où le choix de vieux masques de la collection du musée, la fabrication de masques pour les poupées, mais aussi les pantins articulés qui montrent tour à tour différentes facettes. »
« J’aime aussi les choses un peu sales, usées ou ratées. Le foin, la sciure, la toile de jute sur le sol contribuent à « salir » un peu la vitrine, à la rendre plus organique. Les corps en cuir et tissu usés des poupées, le choix de masques des années 30-40 qui ont un côté industriel un peu raté, renforcent cette impression de quelque chose de sale, d’imprécis et trouble. »
Winshluss, Cizo, Felder
Jouets MFerraille, Chambre de démonstration avec enfant
Faites de tous les matins de l’année, le matin de Noël !
Plongez dans le monde merveilleux et multicolore des Jouets MFerraille. Fabriqués par des enfants pour les enfants, les jouets MFerraille vont rendre tristes, ennuyeux et démodés tous les autres jouets. Avec les Jouets MFerraille, vos enfants seront ivres de bonheur aussi sûrement que s’ils avaient bu une bouteille de cognac cul sec…
« M. Ferraille, c’est une marque totalement fictive que nous avons imaginée, un faux-empire économique de type Disney qui singe certaines logiques commerciales trop envahissantes. A l’instar de Disney avec Mickey, la marque Ferraille est incarnée par un personnage-star : un bonhomme en boîtes de conserves qui est aussi un héros de BD. »
Reumann & Robel (Helge Reumann, né en 1966 en Suisse et Xavier Robel, né en 1971 au Québec
Xavier Robel et Helge Reumann ont rompu avec la logique des bandes dessinées traditionnelles et développent un goût pour l’absurde et l’art brut. Leurs styles se confondent dans des histoires qui semblent naïves mais sont en réalité cruelles et cyniques. Pour Toy Comix, Xavier suspend des Soft Fabrics Toys, un ensemble d’objets en peluche rose aux formes organiques, tandis que Helge présente une série de jouets uniques en bois. Ils seront environnés de voitures de course, de rallye, de police et de jouets en plastique latex.
Une installation
Le Tampographe de Sardon (né en 1970, en France)
Auteur d’illustrations de presse et de bandes dessinées, Sardon a débuté en 1993 la confection de « tampons » qu’il réalise lui-même de A à Z (gravure, gomme, boîte...). Pour Toy Comix, il réalise une « peinture murale » qui évoque des souvenirs de manifestations dans le pays basque de son enfance. Façades endommagées, manifestants, voitures brûlées sont évoqués à l’aide de ses tampons sur le mur. Les objets-tampons ayant servis à réaliser cette « peinture » seront également exposés.
Des films
Pecking Chicken de Thiriet (né en 1958)
Dessinateur régulier pour les magazines Psikopat, Fluide Glacial, Spirou… Thiriet a aussi participé plusieurs fois aux activités de l’OuBaPo. Depuis 1997, il a aussi réalisé trois courts métrages qui mettent en scène un jouet mécanique : Pecking Chicken. Le premier Pecking Chicken est né de l’envie de « faire un film chez lui sans rien acheter ». Réalisé avec un camescope, il a obtenu un prix et a pu s’acheter une caméra numérique avec laquelle il a réalisé son dernier opus en 2004. Les trois courts métrages seront projetés dans le cadre de l’exposition Toy Comix.
Des interviews
« Alors moi mon jouet c’était... »
Dans la salle multimédia de la Galerie des jouets, un film-interview évoque les jouets d’enfance préférés des artistes. Drôles, cocasses, mais aussi inquiétantes, leurs réponses se succèdent à travers des souvenirs d’enfance encore bien présents. Certains ont retrouvé voire gardé le jouet de leur enfance qui sera exposé dans la Galerie. Le film produit par le Musée des Arts Décoratifs est réalisé et monté par Olivier Souchard et sa conception graphique créée par Etienne Mineur pour Incandescence.