Les jouets présentés couvrent une période allant de la fin du XVIIe siècle au XXIe siècle, de la maison de poupée attribuée au sculpteur Burchard Precht, commandée par la reine Ulrika Eleonora (1685-1690), à celle de la marque Lundby (2010). L’exposition fait découvrir l’inventivité, la qualité et l’intemporalité des jouets en bois suédois à travers différents thèmes tels que l’animal, la maison de poupée, les jouets éducatifs, les véhicules, les jouets d’hiver ou les héros de la culture populaire. On y trouve par exemple des chevaux peints à la main de décors très colorés, typiques de la Dalécarlie, une région du centre de la Suède, une voiture réalisée à partir d’une boite de bonbons en bois ou encore des patins à glace pour se rendre à l’école ou un lance-pierre artisanal. Fabriqués par des enfants, des parents, des artisans ou des industriels, ces jouets mettent en œuvre des techniques diverses, célébrant à la fois la tradition et l’innovation ainsi que les méthodes d’apprentissage développées à l’école. Ce panorama, mis en scène par la designer matali crasset, est enrichi par une iconographie abondante et variée – dessins, posters, catalogues, livres pour enfants, films, jeux – permettant de recontextualiser ces créations.
Le matériau bois : tradition et innovation
Si l’Allemagne, le Japon et les États-Unis ont historiquement produit et exporté dans le monde la plupart des jouets, la Suède a une longue et forte tradition dans le domaine de la fabrication de jouets en bois. En Laponie, les indigènes Sami réalisaient des rennes et des poupées en bois découpé pour leurs enfants, tandis que les paysans fabriquaient des jouets directement inspirés de leur environnement, représentant souvent des animaux aux formes simplifiées, surtout des chevaux, animal omniprésent.
À partir du XIXe siècle, la fabrication de petits objets en bois ne relève plus seulement de la tradition, mais aussi d’une politique active en faveur du développement de l’enfant, dans les milieux ruraux comme bourgeois, dans les écoles comme à la maison. Cette pédagogie repose, aujourd’hui encore, sur le Sloyd (du suédois slöjd : « artisanat » ou « travaux manuels », dérivé de l’adjectif slög : « adroit »), un système éducatif basé sur le travail manuel et développé dès les années 1870 par Otto Salomon (1849-1907), qui considérait qu’un individu instruit devait également être habile de ses mains, et que l’école devait cesser de privilégier un savoir superficiel. Dès lors les jeux éducatifs constituent un outil indispensable pour développer le corps et l’esprit de l’enfant. Abondamment utilisé dans les cours de Sloyd, le métier à tisser est devenu de cette manière l’un des jouets éducatifs les plus répandus en Suède, aux côtés de représentations réalistes d’objets du quotidien, ustensiles de cuisine miniatures, planche à laver, etc. Les jeux à empiler multicolores, les jeux de construction en bois brut et les divers jeux d’adresse et de patience sont également essentiels au développement de l’enfant.
Après la Seconde Guerre mondiale, la conception par la marque Brio d’une version en bois d’un jeu de construction de type Meccano (normalement en métal) témoigne de la persistance de cette réflexion et de l’utilisation du bois à l’ère du plastique et du métal.
L’industrie du jouet en bois suédois naît au milieu du XIXe siècle, au moment où se développe le culte de l’enfant dans le monde occidental. Principalement située dans les forêts du Småland et de la Scanie, cette industrie voit l’émergence de marques qui resteront célèbres et s’exporteront au-delà des frontières suédoises. Des marques comme Gemla, Berglind et Brio se créent durant cette période, fabriquant des chevaux en bois découpé peints et du mobilier miniature représentant des intérieurs bourgeois. La gamme s’élargit ensuite aux jeux de croquet, aux jeux de société et aux puzzles, aux transports et aux jouets de guerre. Ces jouets se vendaient chez Nordiska Kompaniet, un élégant grand magasin de Stockholm.
Aujourd’hui, la plupart des fabricants tels Micki ou Brio sont installés dans le sud de la Suède et exportent leurs jouets dans le monde entier. Lundby, spécialiste des maisons de poupées électrifiées, et Playsam, marque connue pour ses véhicules en bois laqué très stylisés, sont également très actifs.
La littérature jeunesse
L’exposition souligne également la richesse de la littérature jeunesse suédoise, source d’inspiration pour de nombreux fabricants de jouets. L’oie de Brio vient de l’ouvrage Les Merveilleuses Aventures de Nils Holgersson à travers la Suède de Selma Lagerlöf (1906) : histoire d’un jeune garçon qui survole la Suède sur une oie dans un voyage initiatique rempli d’anecdotes et de légendes. On retrouvera aussi Fifi Brindacier, personnage principal d’une série de romans écrits à partir de 1945 par Astrid Lindgren, et plus récemment le gentil fantôme Laban, qui ont marqué plusieurs générations d’enfants.