Affiches cubaines. Révolution et Cinéma

du 31 octobre 2019 au 2 février 2020

60 ans après la Révolution à Cuba, le Musée des Arts Décoratifs dévoile, du 31 octobre 2019 au 2 février 2020, l’âge d’or de l’affiche cubaine des années 1960 et 1970 dans un contexte culturel et politique dont les artistes se sont emparés.

Longtemps méconnue en raison du blocus et de l’isolement de Cuba, cette école stylistique commence tout juste à sortir du huis clos dans lequel elle s’est construite. Affiches cubaines. Révolution et Cinéma propose d’explorer cette effervescente production graphique à travers 300 affiches, principalement issues des collections du musée. Elle permet de découvrir et de comprendre l’éclosion de cette grande école d’affichistes et de suivre, à travers elle, l’histoire de l’État insulaire.

Hashtag : #AffichesCubaines

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Commissariat
• Amélie GASTAUT, conservatrice en chef, collections Design graphique/Publicité

Exposition réalisée avec le soutien de la société Havana Club International

Présentation
Affiches cubaines. Révolution et Cinéma - YouTube

Si l’affiche cubaine apparaît sur l’île dès la fin du XIXe siècle, il faut attendre la période de la Révolution pour qu’elle devienne une école à part entière. Jusqu’en 1959, date de l’arrivée de Fidel Castro au pouvoir, elle est essentiellement commerciale et vante la consommation de produits d’importation, prenant pour modèle la publicité américaine dont la présence est fortement encouragée par le régime républicain. Pendant la période Révolutionnaire, et avec l’interdiction de la publicité commerciale par Che Guevera, alors ministre de l’industrie (1961), l’affiche devient politique et culturelle.

  • Dimas (Jorge Dimas Gonzales Linares, dit), 1 Mayo
    ICAIC, 1973
    © MAD, Paris
  • Olivio Martinez, le 8 octobre journée du Guérillero héroïque
    OSPAAAL, 1973
    © MAD, Paris / photo : Christophe Dellière

Les affiches politiques cubaines trouvent leur inspiration dans les événements historiques de la Révolution et mettent en avant ses figures héroïques : première tentative de renversement par Fidel Castro du général Baptista avec l’attaque de la caserne Moncada à Santiago de Cuba en 1953 ; constitution du mouvement révolutionnaire du « 26 juillet » ; compagnons d’armes de la Guerilla avec les figures du Che et de Camillo Cienfuegos ; prise de la Havane et du pouvoir par la Guerilla en 1959, débarquement de la baie des Cochons par les États-Unis en réaction au rapprochement de Cuba avec l’URSS, etc.

Niko (Antonio Perez Gonzales, dit), Leyenda gitana
Dir. : Imre Gyongyossy, ICAIC, 1973
© MAD, Paris

L’OSPAAL (Organisation de Solidarité avec les peuples d’Afrique, d’Asie et d’Amérique Latine) et le DOR (Direction Orientation Révolutionnaire) sont les deux principaux organismes à éditer des affiches politiques à cette époque. Le premier est en charge des problèmes de solidarité internationale – plus particulièrement avec le Tiers-Monde –, le second de l’orientation révolutionnaire à l’intérieur du pays. On doit à Felix Beltran et Alfredo Rostgaard quelques-unes des plus belles réalisations cubaines dans ce domaine.

L’affiche culturelle est, quant à elle, presque exclusivement liée au cinéma, tradition faisant partie intégrante de l’histoire de Cuba qui compte, en 1943, 422 salles dans tout le pays. Le 7e Art devient ainsi, pour Fidel Castro, l’un des principaux outils d’éducation du peuple pour mener à bien sa politique culturelle.

René Azcuy Cardenas, El Leopardo film sirio
ICAIC
© MAD, Paris

Dès sa fondation, en 1959, l’ICAIC (Institut Cubain d’Art et d’Industrie Cinématographique) devient le plus important commanditaire d’affiches, et impose très rapidement un style qui favorise la naissance d’une École. Elle s’impose sur la scène internationale avec René Azcuy Cardenas, Niko, Eduardo Munoz Bachs ou encore Antonio Reboiro comme principaux représentants.

S’échappant de la formule conventionnelle qui présente l’acteur principal ou une scène du film, l’affiche de cinéma est une interprétation libre qui s’émancipe des codes graphiques imposés jusqu’alors par les agences de communication américaines implantées sur l’île. Désormais considérée comme un instrument de propagande, l’affiche doit aussi procurer du plaisir et éduquer à l’art. Les affichistes de l’époque puisent alors leur inspiration dans les courants artistiques contemporains : le pop art, le psychédélisme ou encore le cinétisme. À la différence de nombreux pays communistes dans lesquels l’affiche devait obéir au dictat esthétique du réalisme socialiste, Fidel Castro prône une liberté totale sur le plan formel, voyant dans ce médium une « manifestation visuelle de grand format mise à la portée du peuple qui ne fréquente ni musée ni galerie ».

Eduardo Munoz Bachs, Ichi y la fugitiva
Direccion : Kimiyoshi Yasuda, ICAIC, 1973
© MAD, Paris

La renommée des affichistes cubains est au sommet jusqu’à l’effondrement du bloc soviétique en 1980, avec qui le pays réalise alors 80% du commerce extérieur. Cuba entre dans une grave crise économique et la production d’affiches connaît un arrêt brutal. Les jeunes diplômés de l’ISDI (Institut Supérieur de Design) débutent alors leur carrière dans une conjoncture qui voit une baisse significative de la commande publique. De petits groupes de designers se forment pour créer librement, à l’instar de Next Génération, fondé par Pépé Menéndez (1993-1997), qui incarne une figure clé de ce nouveau courant.

Le collectif NUDO formé par Eduardo Marin et Vladimir Llaguno, traduit quant à lui l’esprit volontairement provocateur vis-à-vis des règles graphiques adoptées jusqu’alors. Il faut attendre les années 2000 pour voir arriver une nouvelle génération d’affichistes cubains qui renoue avec une pratique résolument expérimentale et artistique.

Le parcours de l’exposition, chronologique et monographique, introduit le visiteur à l’histoire de Cuba à travers les affiches politiques, en remettant en contexte les grands événements qui ont inspiré les artistes de l’époque révolutionnaire.

Antonio Reboiro, Corazon solitario
Dir : Francisco Betriu, ICAIC, 1973
© MAD, Paris

Il se poursuit avec l’affiche de cinéma et l’un de ses grands commanditaires ; l’ICAIC et convoque successivement ses grandes figures ; René Azcuy Cardenas, Niko, Eduardo Munoz Bachs et Antonio Reboiro. Enfin, l’exposition s’intéresse à la nouvelle génération d’artistes et révèle toute la richesse de la production contemporaine. Elle réunit des œuvres issues de la collection privée de Luigi Bardellotto, inédite en France.

Affiches cubaines. Révolution et Cinéma est une invitation à explorer un patrimoine graphique encore méconnu, qui lui redonne sa place dans l’histoire internationale de l’affiche.

Organización de Solidaridad de los Pueblos de África, Asia y América Latina

L’Organisation de Solidarité des Peuples d’Afrique, d’Asie et d’Amérique Latine (OSPAAAL) est fondée en janvier 1966 lors de la Conférence Tricontinentale qui réunit à La Havane des organisations indépendantistes et révolutionnaires, non gouvernementales, exceptions faites de celles au pouvoir (URSS, Chine, Cuba…), de 82 pays principalement du tiers-monde pour « coordonner et intensifier la lutte des peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine contre l’impérialisme, le colonialisme et le néo-colonialisme ayant à leur tête l’impérialisme américain ». Cette conférence est sans lendemain mais l’OSPAAAL subsiste, surtout comme organe de la politique extérieure de Cuba. L’OSPAAAL se dote, dès 1967, d’une tribune internationale permettant de relayer les actions révolutionnaires du tiers-monde, le magazine bimensuel Tricontinental. Édité à 50 000 exemplaires en quatre langues (espagnol, anglais, français et arabe), le magazine diffusé dans 60 pays est accompagné d’une affiche pliée et encartée.

Alfredo Rostgaard, Nixon
OSPAAAL, 1972. Offset
© Collection La contemporaine

Sous l’impulsion d’Alfredo Rostgaard, directeur artistique jusqu’en 1975, les graphistes élaborent des affiches qui mettent en scène les combats d’indépendance à travers des emblèmes folkloriques propres à chaque région, des portraits des leaders des mouvements révolutionnaires (Ho Chi Minh, Patricio Lumumba, Nelson Mandela, etc.), des drapeaux et d’autres symboles patriotiques des pays représentés. Ces affiches dénoncent aussi les discriminations raciales aux États-Unis. La révolution cubaine est également représentée à travers ses héros et en particulier la figure du Che, initiateur de la Tricontinentale, symbole de la volonté de fédérer les luttes tiers-mondistes, et dont la mort en 1967 coïncide avec les premières affiches de l’OSPAAAL.

Au début des années 1990, plus de 300 affiches ont été créées lorsque leur production diminue du fait de la crise économique consécutive à l’effondrement du bloc soviétique. Elle reprend progressivement vers 1995 abordant de nouveaux thèmes tels que le développement social mondial, le néolibéralisme ou l’embargo des États-Unis à Cuba.

Instituto Cubano del Arte e Industria Cinematográficos (ICAIC)

En mars 1959, le gouvernement cubain met en place l’Institut Cubain des Arts et de l’Industrie Cinématographiques (ICAIC) avec pour objectif de construire un cinéma national novateur en rupture avec le modèle commercial américain. Il s’agit aussi d’utiliser ce puissant vecteur d’éducation populaire pour promouvoir et légitimer le régime. Pour favoriser l’accès des films au plus grand nombre, l’ICAIC met en place Cine-móvil, un système d’unités mobiles de projection pour les endroits les plus isolés de l’île. L’ICAIC devient le principal producteur de films du pays, dont elle assure, à partir de 1961, la distribution exclusive dans les 600 salles du territoire. L’ICAIC diffuse aussi des films étrangers, issus des pays du bloc soviétique mais également issus du « nouveau cinéma » (néoréalisme italien, Nouvelle Vague française, Free cinema anglais…).

René Azcuy, Settimana del cinema cubano
ICAIC, 1976. Sérigraphie
© MAD, Paris

L’aspect promotionnel n’est pas négligé avec la création de la revue spécialisée Cine Cubano et avec l’édition de plus de 3 000 affiches imprimées en sérigraphie. Les graphistes de l’ICAIC bénéficient d’une grande liberté d’expression. Influencés par les courants artistiques de l’époque, chacun s’invente une manière propre à partir d’une interprétation très personnelle des films. Ils créent un langage graphique original - simplification du texte, couleurs en à-plats vives mais limitées, petit format standardisé, prédominance du blanc du papier laissé en réserve par souci d’économie - conférant à l’affiche de cinéma cubaine une identité propre en rupture avec les photographies de stars américaines.

À la fin des années 1970, les consignes officielles de la bureaucratie se rigidifient. La crise économique s’aggrave après la disparition de l’URSS en 1990, et l’ICAIC ne peut plus acheter ou produire de films. Censure et pénuries poussent de nombreux artistes à émigrer. L’ICAIC se recentre sur l’organisation d’expositions, de festivals et sur la formation avec la création de l’École Internationale de Cinéma et Télévision (EICTV) à San Antonio de los Baños (1985) et la Faculté de cinéma de l’Instituto Superior de Arte (1988). À partir des années 2000, la nouvelle génération ainsi professionnalisée donne un nouveau souffle à l’ICAIC.

Eduardo Muñoz Bachs

En lutte contre le fascisme, la famille Muñoz Bachs fuit l’Espagne puis l’Europe après les victoires respectives de Franco et Hitler. Passant la France, la Martinique et Saint-Domingue, ils s’installent à Cuba en 1941. Eduardo Muñoz Bachs se passionne dès l’enfance pour le dessin mais n’étudie que quelques mois le dessin commercial à l’école Garcés à La Havane, au début des années 1950. En 1952, il entre comme apprenti artiste à la chaîne de radio-télévision CMQ-TV. En 1957, il réalise des films d’animation pour l’agence de publicité Advertising Siboney. En 1959, il intègre le département des dessins animés de l’ICAIC. Il conçoit la première affiche pour cette institution en 1960, pour le film Historias de la Revolución et l’année suivante, il demande son transfert au département des affiches. Dans les années 1960, il travaille aussi pour d’autres organismes gouvernementaux : la Cinémathèque de Cuba, l’agence de propagande Intercomunicaciones (1964), la COR (1967) et Cuba magazine (1970).

Eduardo Muñoz Bachs, B.V. en las montañas y al mar
Director : M. Dragan, ICAIC, 1973. Sérigraphie
© MAD, Paris

Il est en outre très connu comme auteur et illustrateur de livres pour enfants. Dans les années 1980, il réalise des illustrations pour les magazines Pablo, Cómicos, El Muñe, Bohemia, Revolución y Cultura, Cine Cubano et Prisma.

Ses influences vont des graphistes André François, Saul Bass ou Henryk Tomaszewski aux peintres Pablo Picasso, Amedeo Modigliani, Marc Chagall, mais aussi à la tératologie (science des malformations des êtres vivants). De son expérience de la communication visuelle, il conserve l’art de la synthèse. Pour le reste, il rompt avec les règles traditionnelles du langage graphique et crée sa propre manière, immédiatement identifiable : des couleurs expressives, une prédilection pour des personnages le plus souvent comiques, une approche humoristique voire satirique, une typographie dessinée. De l’illustration pour enfants, il extrait une sorte de naïveté malicieuse et une grande force poétique. Bachs est l’affichiste le plus prolifique à Cuba avec ses plus de 2 000 affiches, objets de nombreuses expositions et récompenses à Cuba et dans le monde entier.

Antonio Pérez González, dit Ñiko

Licencié de l’Université d’histoire de l’art de La Havane, Ñiko aborde le design graphique en autodidacte. Sa première expérience dans ce domaine date de 1957, au sein d’une agence de publicité pour laquelle il dessine, pendant deux ans, des illustrations d’annonces commerciales. Dès la première année de la révolution, en 1959, il est engagé par le gouvernement au sein de la COR pour réaliser des affiches politiques qui mettent en avant les grands événements de la révolution ou ses figures héroïques. En 1968, il commence à concevoir en tant qu’indépendant des affiches pour l’ICAIC. Ce n’est qu’au début des années 1970 qu’il quitte définitivement la COR pour intégrer l’équipe de graphistes de l’ICAIC.

Antonio Pérez González, dit Ñiko, El Caso Mattei
Dirección : Francesco Rossi. ICAIC, 1974. Sérigraphie
© MAD, Paris

S’il utilise uniquement l’illustration, ses références sont aussi multiples que son style : pop art, minimalisme, collages dans l’esprit surréaliste faits à partir de gravures anciennes, bande dessinée... Cet éclectisme se rejoint dans l’humour et la poésie qui traversent l’ensemble de ses affiches.

En 1981, l’Institut d’art plastique de l’Université de Veracruzana, au Mexique, l’invite pour donner un cours de design graphique. Avec « la période spéciale » des années 1980, qui entraîne le déclin et l’arrêt presque brutal de l’affiche cubaine (l’ICAIC imprime moins de cinq affiches par an, contre une par semaine dans les années 1970), Ñiko est nommé président de la section graphique de l’Union des écrivains et des artistes cubains. Désireux de poursuivre sa pratique d’affichiste et suite à l’invitation pour enseigner à l’Université de Veracruzana à Xalapa, au Mexique, Ñiko quitte définitivement Cuba.

René Azcuy Cárdenas

Diplômé de l’École nationale des beaux-arts de San Alejandro et de l’École supérieure des arts et métiers de La Havane en 1957, René Azcuy Cárdenas débute sa carrière professionnelle comme illustrateur pour des agences de publicité avant d’intégrer la Cité du sport pour laquelle il réalise des affiches. En 1963, Saul Yelin, membre fondateur de l’ICAIC aux côtés d’Alfredo Guevara, l’intègre dans l’équipe des graphistes. En charge au départ de la réalisation des annonces presse et des communiqués de presse pour le Distributeur National des Films, il se voit rapidement confier la conception d’affiches de cinéma. Jusqu’en 1983, René Azcuy Cárdenas crée plus de 250 affiches pour l’ICAIC.

René Azcuy Cárdenas, En el cielo y en la tierra
Dirección : Julian Dziedzina, ICAIC, 1975. Sérigraphie
© MAD, Paris

Si ses premières affiches font appel à l’illustration, à une gamme de couleurs vives et à l’humour, il faut attendre 1970 pour qu’il trouve son style graphique, qui lui vaudra le surnom de « Negro Azcuy » : sa gamme chromatique se réduit à l’utilisation essentielle du blanc et du noir, il délaisse l’illustration pour l’utilisation de la photographie qu’il récupère dans des magazines, qu’il recadre en gros plan et dont il accentue les contrastes pour éliminer les détails et jouer avec la trame.

Parallèlement à son travail au sein de l’ICAIC, Azcuy Cárdenas entame, en 1971, une carrière d’enseignant, au sein de l’École d’architecture de La Havane et de l’Institut supérieur polytechnique José Antonio Echeverria. En 1983, il quitte l’ICAIC pour rejoindre l’Union des écrivains et des artistes, qui relève du ministère de la Culture. Il s’implique principalement à la préparation de la loi 106 pour l’amélioration du statut social des artistes cubains, qui est promulguée en 1988. À partir de 1992, il se consacre exclusivement à sa carrière de professeur au sein de l’Université de Benemeritas de Puebla, au Mexique où il s’installe avant de rejoindre sa famille à Miami.

Antonio Fernández Reboiro

Fils d’immigrants espagnols, Antonio Fernández Reboiro étudie six ans la médecine avant de se tourner en 1959 vers l’architecture et le design à l’Université de La Havane. Il fonde un magazine touristique anglophone, Havana Picture Guide, et collabore avec l’architecte Ricardo Porro à la construction des écoles d’art de La Havane. En 1963, il intègre le département des affiches de l’ICAIC. Ce véritable laboratoire d’expérimentation, lui offre pendant près de deux décennies un espace de liberté formelle où il peut donner libre cours à une imagination débordante influencée aussi bien par l’Art nouveau, l’Art déco ou le constructivisme géométrique que l’op art, le pop art ou l’art psychédélique.

Antonio Fernández Reboiro, Mañana será tarde
Dirección : Martin Tapak / Alexander Karpov, ICAIC, 1974. Sérigraphie
© MAD, Paris

Ses affiches fonctionnent comme des énigmes visant à stimuler la réflexion du spectateur grâce à différentes « clés », véritables synthèses graphiques d’éléments symboliques, figuratifs, abstraits ou surréalistes. Ces métaphores élégantes sont servies par de puissants effets optiques, une grande maîtrise du cadrage et une mise en page étudiée. Mais la caractéristique principale des affiches de Reboiro réside dans la couleur, ou plutôt l’explosion de couleurs vives.

Persécuté par les autorités pour son homosexualité, il décide de s’exiler en 1982 à l’occasion d’une exposition à Cannes. Il vit un temps en France puis s’installe en Espagne où il continue son travail de graphiste. Il est directeur artistique pour deux revues théâtrales (Pipirijaina et El público), ainsi que pour une institution de promotion musicale, Ibermúsica. Il réalise des affiches et l’identité visuelle de nombreux théâtres, orchestres, ballets, opéras ou festivals espagnols et étrangers. Depuis 1994, il conçoit les brochures et les livres de FUNDESCO (Fundación para el Desarrollo de la Función Social de las Comunicaciones). En 1998, il établit son studio graphique à Miami où il réalise un travail personnel sur cette ville (125 affiches) et partage son temps entre les États-Unis et l’Espagne. Dans les années 2010, il se consacre entièrement à la peinture.

Le renouveau de l’affiche cubaine

Les bouleversements du paysage politique mondial amorcés par la chute du mur de Berlin en 1989 et poursuivis par la dissolution de l’Union soviétique et de son soutien à Cuba, entraînent une crise économique sans précédent sur l’île : c’est le début de « la période spéciale ». Dans ce contexte économique extrêmement difficile, l’affiche cubaine connaît un déclin.

Nudo (Eduardo Marín, Vladimir Llaguno), La plastica joven se dedica al beisbol
1989. Sérigraphie
© Centro Studi Cartel Cubano / Collezione Bardellotto

Confrontés à une baisse significative de la commande publique et à une pénurie des matières premières, plusieurs jeunes étudiants de l’ISDI, Institut supérieur de design, choisissent de se réunir pour former des petits groupes dynamiques. Le collectif Nudo, composé d’Eduardo Marìn et de Vladimir Llaguno, se distingue à la fois comme témoin et précurseur de ce tournant. Ces deux artistes conjuguent l’expérimentation des premiers logiciels de design graphique et un esprit profondément provocateur à l’égard des conventions du graphisme cubain.

Pepe Menéndez est assurément une autre personnalité clé de ce nouveau courant issu de la création de l’ISDI. Fondateur de divers groupes et mouvements dont Next Generation (1993-1997) et Club de Amigos del Cartel (CACa, 2007), il dirige ensuite la section graphique de La Casa de las Américas.

Les longues années de la période spéciale ont mis les artistes à l’épreuve à tout point de vue : économique, artistique et technique. Nombreux sont ceux qui ont décidé d’émigrer, mais ceux qui sont restés sont devenus, au début des années 2000, des références pour le renouveau de l’ISDI, lui aussi affecté par la crise. Les institutions cubaines (l’ICAIC, La Casa de las Américas, l’Asociación Hermanos Saíz) connaissent elles aussi un regain d’énergie et d’esprit d’entreprise.

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