Louis Süe (1875-1968) et Paul Huillard (1875-1966), Damon et Berteaux, ébénistes, Fauteuil, Paris, 1912

Louis Süe (1875-1968) et Paul Huillard (1875-1966), Damon et Berteaux, ébénistes, Fauteuil, Paris, 1912

Hêtre laqué jaune, vert et rouge, accotoirs et assises façon cuir vert
H. 87 ; l. 53 ; pr. 44 cm
Achat, 1990
Inv. 990.335
© Les Arts Décoratifs

Si vous souhaitez utiliser ce visuel, veuillez contacter la photothèque

Écoutez le commentaire audio de cette œuvre

Les arts décoratifs dans les années 1910 sont porteurs de caractéristiques bien déterminées et variées qui en font un style prometteur et très attachant, encore peu connu aujourd’hui. Dès 1909 de jeunes artistes décorateurs, face aux derniers tenants d’un Art nouveau assagi, prônèrent le retour à la tradition, un parti-pris coloriste, un répertoire décoratif issu du XVIIIe siècle et des ornements inspirés de la passementerie. André Véra, théoricien du groupe, rassembla ces préceptes dans un manifeste qu’il publia en 1912 dans la revue L’Art décoratif. Ce fauteuil et son canapé, qui présentent tous les éléments du nouveau style, font partie d’un ensemble mobilier pour une salle de travail que Louis Süe et Paul Huillard exposèrent au Salon d’automne en 1912, la dernière année de leur collaboration. Le dessin d’une chaise appartenant à cet ensemble illustrait le texte de Véra, alors collaborateur de Süe au sein de L’Atelier français. La forme très classique est issue du mobilier provençal du XVIIIe siècle et notamment de la banquette appelée « radassié ». Le choix du matériau – le bois peint – et des couleurs vives correspond à cette tendance coloriste qui s’inspirait à la fois du Werkbund allemand, des peintres fauves et des Ballets russes. La corbeille de fleurs qui décore le dossier du fauteuil illustre les idées d’André Véra, pour qui « paniers et guirlandes de fruits et fleurs doivent constituer la marque du nouveau style ». Peintre de formation, Louis Süe avait été admis en 1893 à l’École des beaux-arts pour suivre des études d’architecte. En 1903, il commença sa carrière avec son condisciple Paul Huillard, tous deux participant régulièrement aux Salons des Artistes décorateurs et aux Salons d’automne par des envois d’ensembles mobiliers. En 1912, Louis Süe créa L’Atelier français, avec André Véra et le peintre et décorateur André Mare, sur le modèle des ateliers viennois de Josef Hoffmann qu’il avait visités en compagnie du couturier Paul Poiret. Après la guerre, Süe et Mare créèrent la Compagnie des arts français et participèrent à la reconstruction en réalisant des ensembles mobiliers bon marché vendus par correspondance. À l’Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes de 1925, la Compagnie réalisa le pavillon Fontaine, la salle des fêtes du Grand Palais et surtout le musée d’Art contemporain, qui était un résumé de leurs théories publiées dans le manifeste Architectures en 1921. En 1928, la Compagnie des arts français fut revendue à Jacques Adnet, et Louis Süe continua à travailler seul.

É. P.

Évelyne Possémé, « Mobilier. Décoration », dans Anne Bony, Les Années 10, Paris, Éditions du Regard, 1991.

Suivez-nous

Abonnez-vous à notre newsletter

fond=article-collection}{id_article}{env}