La bicyclette, une image de la liberté
{Clément. Paris}
Clément. Paris
Jean de Paléologue dit Pal, affichiste  ; Paul Dupont 4 rue du Bouloi Paris, imprimeur. Lithographie, 1895. H. : 148,9 cm  ; l. : 109,4 cm. Paris, Musée des Arts Décoratifs, inv. 14037. Legs Roger Braun, 1941
© Les Arts Décoratifs / photo : Jean Tholance

Alors que les préoccupations écologiques sont dans toutes les têtes et que la perception de l’enjeu économique et social de la mobilité quotidienne s’accroît, à l’aube du printemps, le département Design graphique et publicité met le vélo à l’honneur.

En 1979, le musée de l’Affiche de la rue de Paradis, dont le département Design graphique et publicité du musée des Arts décoratifs est issu, consacre une exposition à l’affiche de vélo intitulée « La petite reine – Le vélo en affiche à la fin du XIXe siècle ». En effet, au tournant du siècle, la bicyclette, qui révolutionne notre mode de vie, fait l’objet d’une publicité sans égal, son image est multipliée comme l’est, de nos jours, celle de la voiture.

Qu’il s’agisse du confort d’une élégante qui, grâce au dérailleur trois vitesses de Brossard vanté par l’affiche d’Adrien Barrère, peut monter la côte tout en cueillant une fleur, du cycle Hurtu dont la géométrie est taillée pour le cyclotourisme, ou du tandem enfourché par deux amoureux poétiquement dessiné par Pal pour la Société des Vélocipèdes Clément, c’est avant tout sur les sentiments de liberté et de confort que se concentre l’essentiel du message.

{Fulwell Cycles Co. The Flying Wheel Cycles}
Fulwell Cycles Co. The Flying Wheel Cycles
Anonyme (affichiste)  ; W. I. Rodway & Co, Engravers & Lithographers Burmingham-Paris, imprimeur. Lithographie, 1894/1900. H. : 91,5 cm  ; l. : 61 cm. Paris, Musée des Arts Décoratifs, inv. RI 2006.82.53. Legs Roger Braun, 1941
© Les Arts Décoratifs / photo : Jean Tholance

Mais les formes que prennent ces affiches sont parfois moins ordinaires. Vers 1899, entre nationalisme historique et découvertes archéologiques, Pal présente une gauloise wagnérienne dont la monture n’est autre que la robuste bicyclette Liberator. Régulièrement saluée au Salon du Cycle de Paris pour la légèreté et la maniabilité de ses vélos, la Fulwell Cycle Company de Coventry choisit quant à elle une figure proche de l’allégorie de la Fortune, en équilibre sur une roue ailée. De façon beaucoup plus inattendue, Jules-Alexandre Grün, peintre de renom et affichiste, fait le pari d’une affiche ne montrant pas le produit mais représente, le « doux rêve » d’une femme endormie, dénudée et semblant sourire qui n’attend qu’une chose, « avoir une bicyclette Kymris ».

Le vélo, image de marque et épopée sportive

S’il révolutionne profondément la mobilité individuelle et devint synonyme de liberté, le vélo, dès son apparition dans la première moitié du XIXe siècle, est aussi synonyme de progrès techniques, valeur capitale de l’ère industrielle.

{Peugeot (lion)}
Peugeot (lion)
Georges Favre, affichiste  ; Affiches Gaillard Paris-Amiens, éditeur et imprimeur. Lithographie, 1928. H. : 119,5 cm  ; l. : 78,5 cm. Paris, musée des Arts décoratifs, inv. 996.71.3
Achat grâce au mécénat de Michel et Hélène David-Weill, 1998
© Les Arts Décoratifs / photo : Jean Tholance

Trente ans après l’éloquence classique de l’affiche de Tamagno pour les vélocipèdes de l’historique maison Peugeot de Valentigney, c’est la puissante affiche de Georges Favre qui glorifie les machines de la «  Nouvelle société des cycles Peugeot », manufacture créée en 1926, exclusivement dévolue à la fabrication des cycles. Les grandes qualités plastiques de l’affiche sont immédiatement saluées par le critique Pierre Andrin qui précise que «  peu d’affichistes sont parvenus à servir aussi efficacement la notoriété d’une vieille maison en rajeunissant si heureusement la présentation de ses produits ». Quand le lion glorieux présente son trophée, c’est en fait Peugeot qui expose son vélo.

Au cœur d’un siècle qui connaît le développement des pensées hygiénistes et la promotion de l’exercice physique, l’exploit sportif s’agrège à l’image du vélo. C’est ainsi qu’Albert Guillaume compose l’affiche des Cycles Vincent fils sur laquelle le Président Sadi Carnot couronne des lauriers de la victoire Louis Cottereau, premier champion de France de vitesse à bicyclette. Sur un tirage postérieur à l’assassinat du président, survenu le 24 juin 1894, le portrait de Sadi Carnot est transformé. Un homme hirsute, désormais anonyme, salue le coureur. L’affiche s’adapte à l’actualité immédiate.

  • {Cycles Vincent Fils 10bis Avenue de la Grande Armée Paris}
    Cycles Vincent Fils 10bis Avenue de la Grande Armée Paris
    Albert Guillaume, affichiste  ; Affiches-Camis 172 quai de Jemmapes Paris, imprimeur. Lithographie, 1893. H. : 190 cm  ; l. : 124,5 cm. Paris, musée des Arts décoratifs, inv. 11803. Don Georges Pochet, 1901
    © Les Arts Décoratifs / photo : Jean Tholance
  • {Cycles Vincent Fils 10bis Avenue de la Grande Armée Paris}
    Cycles Vincent Fils 10bis Avenue de la Grande Armée Paris
    Albert Guillaume, affichiste  ; Affiches-Camis 172 quai de Jemmapes Paris, imprimeur. Lithographie, 1894 (après). H. : 190 cm  ; l. : 124 cm. Paris, musée des Arts décoratifs, inv. 14272. Don Georges Pochet, 1901
    © Les Arts Décoratifs / photo : Jean Tholance
{Toujours premier ! sur vélo France-Sport}
Toujours premier  ! sur vélo France-Sport
Anonyme, affichiste. Bois, carton, métal, lithographie, 1920/1930 (vers). H. : 25 cm  ; l. : 15 cm. Paris, musée des Arts décoratifs, inv. 2013.104.159. Don Anne et Michel Lombardini, 2013
© Les Arts Décoratifs / photo : Jean Tholance

Le cycliste compétiteur et victorieux qui, grâces aux prouesses techniques de son vélo est aussi rapide qu’à l’aise, est donc la bonne grammaire pour la communication des fabricants. Elle est exploitée sur l’affiche des célèbres Cycles Lorette ou encore sur un éventail-écran destiné à la promotion des cycles France-Sport, «  la grande marque sportive  », dont l’équipe qu’elle mécène compta aussi de très nombreux champions.

En 2002, à l’heure où la publicité pour les bicyclettes à presque disparue du champ visuel, Foré dessine, mais cette fois-ci pour un événement sportif, dans un maillage géométrique de rayons aux couleurs tendres proche de l’art cinétique, un coureur dans l’effort portant à l’épaule son vélo. Foré, «  poète, peintre, sculpteur, est aussi coureur cycliste comme Vlaminck  » selon Claude Sorel, fait du vélo un compagnon dans l’épreuve.

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