Sculpteurs inclassables, ne formant qu’un
aux yeux du public, le couple formé par
Claude et François-Xavier Lalanne est
connu pour avoir fait de la nature et des
animaux l’inspiration de leurs créations.
De ces œuvres souvent hybrides naissent
l’émotion, l’étonnement, l’amusement, une
poésie nourrie de surréalisme, une vision
artistique guidée par le jeu sur les mots,
les formes et les matières. À cette liberté,
ils jouent aussi de la hiérarchie des arts
de manière pionnière, offrant des usages
inédits à leur sculptures magistrales.
Si les collections publiques françaises
en présentent dorénavant des exemples
d’exception, à travers cette dation
notamment, la portée internationale de leur
carrière a amené nombre de leurs œuvres
à figurer dans d’importantes collections
particulières à travers le monde.
En France, le Musée des Arts Décoratifs
conserve ainsi quelques pièces de grande
qualité embrassant l’art et la carrière des
Lalanne : le collier Bouche en or, un sautoir
Ronces, un couvert en argent du service
dit Iolas de Claude Lalanne mais également
le secrétaire Deuxième Rhinocéros, chef-d’œuvre
de François-Xavier Lalanne, ainsi
qu’un banc Crocodile de Claude Lalanne.
Dans l’allée centrale de la nef, le parcours
de cette exposition s’articule autour des
16 pièces issues de la dation qui mêlent
œuvres uniques, jalons historiques de leur
carrière, et créations que les éditions ont
rendu fameuses, en parfait adéquation
avec l’identité et l’histoire même des
collections du Musée des Arts Décoratifs,
« du beau dans l’utile ». Disposées sur des
podiums en damier dans une scénographie
minimaliste, elles dialoguent avec des
œuvres du musée, représentatives
de l’univers artistique des deux créateurs,
mobilier et objets d’arts.
Sur les 16 œuvres du nouveau corpus,
9 sont dues à François-Xavier Lalanne
parmi lesquelles, deux œuvres uniques :
La Mouche (1966-1967) et l’Hippopotame I
(1968-1969), qui renferme un lavabo et une
baignoire. Ces deux pièces dénotent
d’emblée les caractéristiques fortes
du travail de François-Xavier Lalanne, son
inscription dans l’histoire de la sculpture,
le goût du monumental, et un sens certain
de la poésie et de l’humour.
La dation
comprend aussi ses projets autour des
Têtes habitables (datant du début des
années 1970) dont deux maquettes, qui
témoignent d’une réflexion née de projets
de collaboration avec l’architecte Émile
Aillaud, mais aussi des dessins d’études
ou des sculptures plus emblématiques
comme le Singe avisé (2010).
Un ensemble de la série des Nouveaux
moutons (2008) évoque la suite logique
de ses recherches reprenant le principe
des troupeaux en laine en les adaptant
à un usage extérieur, un sujet de réflexion
majeur de la fin de sa carrière, lorsqu’il
se passionne pour l’art des jardins.
Les 7 œuvres de Claude Lalanne rappellent
quant à elles son ambition de sculptrice.
Cette empreinte artistique montre
combien, dans son esprit comme dans
sa pratique, le sens de l’objet se détache
du pur décoratif, à l’instar des pièces
du mobilier Ginkgo (2010-2018) composé
d’une table, d’une banquette et une paire
de chaises qui font écho aux prospections
esthétiques du XIXe siècle et de l’Art
nouveau, comme à l’imagination libre
et surréaliste d’un Emilio Terry.
L’artiste,
nourrie de surréalisme mais aussi d’une
vaste culture artistique, créé l’Homme
à la tête de chou (1968) qui inspira Serge
Gainsbourg à la fin des années 1960, mais
également le Choupatte (2019), ainsi
que la Pomme (2015). Plusieurs dessins
préparatoires et croquis pour des œuvres
clés, comme l’Âne attelé, le Canard, mais
aussi l’Hippopotame de François-Xavier
Lalanne et des études pour les couverts
de Claude Lalanne, complètent l’ensemble.
Cette exposition présente ainsi
un ensemble de François-Xavier
et Claude Lalanne, totalement pertinent
au regard de leur place dans l’histoire
de l’art du XXe siècle et du début du XXIe.
Elle offre au public une vision historique
et harmonieuse de l’œuvre d’un couple
devenu mythique et pour qui l’engouement
médiatique connaît une ampleur
sans précédent.