Lors de son entrée dans les collections, le collet est pris en charge par l’équipe de conservation-restauration du musée. À son arrivée au musée des Arts décoratifs, cette pièce exceptionnelle, datée du XVIe siècle, était dans un état de conservation relativement stable mais il présentait quelques dégradations.

La conservation-restauration du cuir a été confiée à Ingrid Leautey, celle des matériaux textiles à Emmanuelle Garcin. Il a été traité au sein de l’atelier de restauration textile du musée des Arts décoratifs.

Constat

Avant de commencer tout traitement, le collet a fait l’objet d’un constat d’état approfondi et d’une étude matérielle et technique poussée.

Lors du constat, les différentes altérations ont été décrites, observées et documentées en vue de pouvoir établir un diagnostic des dégradations, déterminer si celles-ci étaient évolutives et d’identifier les traces signifiantes liées au parcours matériel de l’œuvre qu’il fallait conserver.

  • Constat d’état : relevé des altérations sur le collet
    © I. Leautey
  • Constat d’état : relevé des altérations sur le collet (dos)
    © I. Leautey

Sur cet objet très ancien le degré d’intervention est différent de ce qui peut être entrepris sur une pièce plus récente ou moins exceptionnelle. Ici le statut patrimonial du collet est déterminé par sa valeur historique et documentaire autant qu’esthétique.

Vue rapprochée : encrassement et taches à la surface de la peau
© I. Leautey

C’est un point de vue similaire à ce qui pourrait être entrepris sur un matériau archéologique, un témoignage historique, où la conservation de ce qui fait l’authenticité de l’objet est déterminante.

Le collet était recouvert d’un voile grisâtre de poussière lié probablement aux conditions de stockage de la pièce et à sa mise en exposition le temps de la vente de la pièce. Un empoussièrement de surface au niveau du panseron laisse en effet à penser à un empoussièrement relativement récent.

D’autre part, la peau présentait des disparités d’encrassement liées à l’usage. Celles-ci ne posant pas de problème de conservation seront évidemment conservées.

L’observation sous loupe binoculaire de l’ensemble du collet a permis de détecter la présence d’amas de cire (type cire de bougie) en deux zones.

  • Observation sous binoculaire
    © I. Leautey
  • Vue sous binoculaire d’une tache de cire
    © I. Leautey
Détail des taches visibles sur la peau
© I. Leautey

Des tâches et éclaboussures, qui semblent postérieures à l’usage du collet, rendent la peau très hétérogène et seront, elles, traitées pour améliorer l’état de présentation de la pièce.

De nombreux résidus d’insectes étaient observables sur le collet. Ils sont majoritairement cachés sous les soutaches.

  • Détail de résidus d’insectes sous les soutaches
    © I. Leautey
  • Détail de résidus d’insectes sous les soutaches
    © I. Leautey
Vues générale avant intervention, intérieur du collet
© E. Garcin

Les matériaux textiles dans leur ensemble sont bien conservés.

Une usure des applications de satin et des encrassements localisés ont été également observés mais sur lesquels le choix est fait de ne pas intervenir car ils ne compromettent pas la conservation du collet à long terme et font partie de la patine et du parcours matériel de ce vêtement ancien.

Seule, la doublure en soie à l’intérieur du vêtement, très lacunaire, présentait un état de dégradation prononcé et évolutif. Quelques lambeaux subsistaient que l’on propose de protéger car ils témoignent encore de la présence de cette doublure.

  • Détail de la dégradation de la doublure
    © E. Garcin
  • Détail de la dégradation de la doublure
    © E. Garcin
Les traitements
Brumisateur à ultrasons
© E. Garcin

En premier lieu les lambeaux de doublure en soie sont stabilisés pour pouvoir ensuite manipuler le collet sans que d’autres débris ne se détachent.

Les fragments sont défroissés et les lambeaux repliés remis à plat à l’aide d’un apport d’humidité contrôlé : de l’eau déminéralisée sous forme de brume produite par ultrasons. Cette technique évite tout apport de chaleur, néfaste à la conservation de fibres anciennes, et permet d’atténuer les faux-plis et le froissement des tissus.

Une fois ces tissus plans, on peut les couvrir d’un tissu transparent qui plaque et protège les textiles anciens.

Ce tissu, une crêpeline de soie, est teinte par nos soins pour s’harmoniser avec le contexte des matériaux originaux à l’aide de châtaigner, un colorant d’origine végétal. Le musée des Arts décoratifs s’inscrit dans des pratiques soutenables et la priorité est donnée pour la pratique de teinture des supports de consolidation aux colorants naturels. Les supports recouvrant chaque fragment encore existant sont maintenus par couture dans la doublure de lin avec un fil de soie très fin, de l’organsin.

  • Détail après stabilisation : un voile transparent de crêpeline de soie recouvre le lambeau et le maintient
    © E. Garcin
  • Vue générale de l’intérieur après stabilisation de la doublure
    © E. Garcin

Le dépoussiérage du cuir a ensuite été réalisé par aspiration à la microbuse sous lunette loupe de grossissement. La conservatrice-restauratrice a scrupuleusement veillé à ne pas ôter les traces de finitions blanches (voir l’étude matérielle à ce propos) lors du traitement.

Le dépoussiérage a été réalisé sous toutes les tresses plates et les rubans appliqués afin de retirer les restes d’insectes. Les cocons et autres résidus ont été retirés également à la pince.

Dépoussiérage en cours
© I. Leautey

Un gommage ponctuel à la gomme latex a été réalisé simultanément avec le dépoussiérage.

Les tâches d’eau, principalement présentes sur le côté droit, ont été désagglomérées à l’aiguille et à la pointe émoussée de scalpel. Cette intervention a permis d’homogénéiser l’aspect de la peau.

Quelques très petites consolidations de zone altérée par les infestations ont été réalisées.

Gommage en cours
© I. Leautey
Conclusion

Le dépoussiérage a permis de retirer le voile grisâtre et la poussière plus incrustée observables sur l’ensemble du collet et de retrouver une couleur plus chaude tout en conservant la patine du temps avec des variations des teintes et d’encrassement probablement liés à l’usage. Le travail de broderies et les différences de traitement de la peau sont mis en valeur.

Le traitement de conservation de la doublure permet à présent le mannequinage du collet pour son exposition. L’état de présentation de ce costume est ainsi amélioré et les dégradations qui menaçaient la conservation des matériaux à court ou moyen terme stabilisées.

Des préconisations nouvelles accompagnent désormais ce vêtement. Le collet doit être manipulé avec des gants et, s’il est exposé, protégé de la poussière et d’une luminosité trop intense.

La température et l’humidité relative de son environnement doivent être contrôlées car les analyses ont montré la très grande sensibilité de son cuir aux températures élevées (dès 35°C).

Après trois mois d’exposition dans les salles dédiées à la Renaissance dans les collections permanentes, le collet peut repartir dans les réserves.

Une boîte sur mesure a été conçue, comme un écrin, pour que cette pièce continue de traverser les siècles dans de bonnes conditions et puisse être apprécié aujourd’hui et demain comme témoignage d’un vêtement d’apparat hors du commun de la Renaissance.

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